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Pratiques migratoires discriminatoires en Lituanie : "Seuls les Africains sont détenus plus longtemps ici"

Depuis janvier 2022, Médecins Sans Frontières fournit des soins de santé primaires et des soins de santé mentale aux migrants et demandeurs d'asile détenus dans les centres de détention lituaniens. Là-bas, nos équipes ont constaté que certaines nationalités sont détenues plus longtemps que d'autres.  Médecins Sans Frontières dénonce aujourd'hui ces pratiques migratoires systématiquement discriminatoires.

Centre de détention en Lituanie : les demandeurs d'asile russes et biélorusses peuvent circuler librement, les demandeurs d'asile nigérians sont détenus plus longtemps

Dans le centre de détention de Kybartai, nos équipes ont pu constater que les demandeurs d'asile russes ou biélorusses récemment arrivés au centre de détention n'ont pas bénéficié d'une prolongation de leur détention ; 100 % d'entre eux ont vu leur liberté de mouvement limitée. En revanche, les demandeurs d'asile nigérians ou indiens - qui représentent plus d'un cinquième de la population totale de Kybartai - ont vu leur détention prolongée après l'expiration de leur ordre de détention. Ainsi, 43% des personnes qui sont détenues plus longtemps à Kybartai sont des Nigérians ou des Indiens.

Het detentiecentrum voor asielzoekers en migranten
Le centre de détention pour demandeurs d'asile et migrants à Kybartai. Les nouveaux arrivants arrivent ici sous un ordre de détention provisoire. Après l'expiration de cet ordre, la détention peut être soit suspendue, soit prolongée. Nos patients de Kybartai témoignent que cette procédure est outrageusement discriminatoire. © MSF 10 août 2022

Même discrimination dans d'autres centres

Le même schéma peut être observé ailleurs en Lituanie. Nos équipes reçoivent des rapports d'autres centres de détention indiquant que des Nigérians et des Congolais, entre autres, ont également été victimes de pratiques migratoires discriminatoires. Il s'agit notamment du maintien en détention (après l'expiration de leur ordre de détention) ou de la révocation de leur liberté de mouvement restreinte, ce qui entraîne leur retour en détention.

"La majorité est déjà partie d'ici, mais nous, les Africains, sommes toujours là"

L'un de nos patients déclare : "Nous, les Africains, sommes toujours là. Les autres nationalités étaient majoritaires. Et maintenant, ils sont tous partis, et nous, Africains, devons rester. Ils nous traitent différemment." Un autre patient témoigne : "Je suis tellement désespéré que j'ai essayé de me faire du mal parce que je veux sortir de cette prison. Parfois, je pense à me tuer. Je souffre, je me sens humilié. Je suis tellement déprimé."

Médecins sans frontières lance un appel : arrêtez cette détention !

Médecins Sans Frontières appelle à la fin immédiate de la détention prolongée. Un système d'asile humain et équitable doit respecter la dignité, la santé et les droits humains des hommes, des femmes et des enfants qui cherchent la sécurité en Lituanie.

Médecins sans frontières est choqué : "La Lituanie a créé une hiérarchie de la souffrance, elle devrait avoir honte"

"Beaucoup de personnes détenues ont survécu à des expériences profondément traumatisantes", déclare Georgina Brown, coordinatrice de Médecins Sans Frontières en Lituanie. "Mais au lieu de répondre à leurs besoins, les autorités lituaniennes exacerbent leur souffrance psychologique en les plaçant en détention et en les laissant dans l'incertitude. Ces hommes, femmes et enfants sont incertains de leur avenir, terrifiés à l'idée d'être renvoyés de force vers le danger qu'ils ont fui, et sont maintenant privés de leur liberté et de leur protection. Leur souffrance ne fera qu'augmenter de façon exponentielle. Nous sommes choqués de constater que certaines nationalités sont plus susceptibles que d'autres de voir leur détention prolongée. Les autorités lituaniennes ont créé une hiérarchie de la souffrance, elles devraient avoir profondément honte."

La politique de dissuasion délibérée viole les droits humains fondamentaux

L'inhumanité avec laquelle la Lituanie traite les populations migrantes n'est malheureusement pas nouvelle pour Médecins Sans Frontières. Partout dans le monde, nos équipes constatent qu'une politique délibérément dissuasive (même en Grèce, en Pologne ou en Hongrie, par exemple) ne sert qu'un seul objectif : priver les personnes en quête de protection internationale de leurs droits humains fondamentaux et accroître de manière exponentielle leurs souffrances.