Forte augmentation des violences envers les migrants depuis la fermeture de la route des Balkans
Depuis la fermeture des frontières dans les Balkans en mars dernier , MSF a vu doubler le nombre de consultations pour traumatismes violents. Pour des milliers de personnes en fuite, cette route constituait l’un des rares moyens d’accéder à une certaine sécurité et protection en Europe.
Aujourd’hui, la situation reste dramatique. Des centaines de personnes vulnérables sont toujours bloquées en Serbie, en ARYM (Ancienne République yougoslave de Macédoine) et en Bulgarie ; certaines tentent de rejoindre leurs pays de destination via des routes dangereuses et en recourant aux services de passeurs malhonnêtes, tandis que d’autres sont coincées dans des zones de transit à la frontière serbo-hongroise.
Recours excessif à la force
En Serbie, les équipes de MSF ont observé une dégradation de la situation humanitaire et médicale directement liée aux restrictions de passage aux frontières qui visent des milliers de migrants et de demandeurs d’asile.
« Ces derniers mois, un nombre croissant de patients nous ont fait part de violences et d’abus, et présentaient des traumatismes physiques directement liés à ces violences. Il s’agissait pour la plupart de violences prétendument commises par les autorités hongroises », explique Simon Burroughs, chef de mission de MSF en Serbie. « Nous enjoignons les autorités hongroises de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à ces pratiques. »
Des familles bloquées et traumatisées
Ces derniers mois, les migrants passant par la Hongrie ont vu leurs possibilités d’asile dans l’Union européenne fortement réduites. En juillet, cette diminution drastique a atteint un nouveau record avec l’introduction d’une mesure étendant les contrôles aux frontières à un périmètre de huit kilomètres dans les terres hongroises, et permettant de renvoyer les migrants en Serbie.
Des dizaines de familles se sont retrouvées bloquées, forcées de choisir entre attendre dans des conditions désastreuses que leur cas soit validé ou s’exposer à davantage de violences et d’abus en recourant aux services de passeurs.
Depuis mars, le nombre de consultations proposées par MSF pour de tels traumatismes a plus que doublé, avec en moyenne un cas sur dix entre avril et juin.
Les équipes de MSF ont pris en charge 188 survivants d’événements traumatiques tels que des maltraitances physiques et des actes de torture, des incarcérations, des enlèvements, ou encore des violences sexuelles commis par des passeurs, la police ou des membres de leur communauté.
Parmi les personnes prises en charge par nos équipes (dont des femmes et des enfants), 65% ont déclaré avoir subi des violences physiques de la part d’individus en uniforme sur le territoire hongrois et 35% ont dit avoir été maltraités par des voleurs, des passeurs ou d’autres migrants.
Des conditions de vie déplorables
Ces restrictions ont également créé une situation très préoccupante dans les zones de transit, à la frontière serbo-hongroise, où MSF gère différentes cliniques mobiles.
« Les conditions de vie ne sont pas humaines ici. Les familles vivent dans des tentes totalement inappropriées, sans douche, sans accès à l’eau potable ni aux services les plus basiques », explique Simon Burroughs. « Cela fait des mois que nous appelons les autorités serbes à améliorer ces conditions déplorables, mais peu de choses changent : les gens sont désespérés. Cette situation a un impact direct sur leur santé physique et mentale. »
La proportion de patients de MSF souffrant de dépression est passée à près d’un sur trois après le mois de mars, alors qu’elle était de 26,7% en octobre 2015. Le pourcentage de personnes souffrant de stress post-traumatique a également augmenté durant cette période, passant de 14 à 15,9%, tout comme celui des patients souffrant d’anxiété, passant lui de 3,8 à 6,6%. Ces augmentations coïncident avec l’introduction en mars de mesures restrictives à la frontière.
Des politiques toujours néfastes
Les mesures européennes ont jugulé le flot de demandeurs d’asile dans les Balkans, mais des milliers de personnes sont abandonnées, loin des regards, et se retrouvent bien plus exposées aux violences, à l’indigence et au désespoir.
Non seulement les gouvernements européens et balkaniques occidentaux manquent à leur devoir d’assistance auprès de milliers de migrants, mais ils militent également en faveur de politiques néfastes au bien-être de personnes déjà très vulnérables. « Une fois encore, nous enjoignons les dirigeants européens de proposer des solutions sûres et légales aux migrants en quête de protection », a conclu Simon Burroughs.