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Cinq années de conflit au Yémen

Dossier

Cinq années de conflit au Yémen

Le 19 mars, la guerre civile au Yémen est entrée dans sa quatrième année. Le conflit incessant a eu un effet dévastateur sur la population yéménite. Une très grande partie des civils sont pris au piège entre les combats, qui font de nombreux morts et blessés.

un enfant blessé par une mine antipersonnel
Un enfant blessé par une mine antipersonnel reçoit des soins dans l'hôpital chirurgical MSF situé à Mocha © Agnes Varraine-Leca/MSF. Décembre 2018.

 

Mis à jour le lun, 09/28/2020 - 18:22

 

Le conflit en quelques mots

Ce conflit armé fait principalement rage dans le Nord-Est du pays, où il oppose le groupe rebelle chiite Ansar Allah, qui soutient l’ancien président Saleh, aux troupes du nouveau gouvernement, principalement sunnite, du président Al-Hadi. Ce dernier peut compter sur le soutien d’une coalition dirigée par l’Arabie saoudite.

Des bombardements quotidiens et le blocus économique ont mis le pays à sac. Le conflit a débouché sur une impasse politique inextricable, opposant quatre parties. Sur la ligne de front entre les villes de Hodeidah, sur la côte ouest, et de Taïz, plus au sud, en particulier, les combats semblent devenir de plus en plus violents.

Impact sur la population

Le conflit incessant a eu un effet dévastateur sur la population yéménite. Une très grande partie des civils sont pris au piège entre les combats, qui font de nombreux morts et blessés. Plus de trois millions de personnes ont dû fuir leur domicile. En l’absence de camps officiels, elles vivent éparpillées dans le pays, dans des conditions très précaires. Certains s’abritent sous de simples bâches en plastique qu’ils ont achetées ou reçues, tandis que d’autres trouvent refuge au sein des communautés locales.

De grandes parties des infrastructures publiques ont été détruites par la guerre, en ce compris de très nombreux établissements de soins. Selon le Yemen Data Project, un institut de recherche indépendant, pas moins d’un tiers des attaques aériennes viserait des cibles non militaires. 

Une semaine au Yémen

Découvrez sept vidéo qui offrent un regard unique sur les défis vécus par la population yéménite et par le personnel médical sur place.

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De plus, les restrictions à l’importation dans le pays – conséquences du blocus – associées à l’inflation élevée du riyal yéménite, la monnaie du pays, limitent encore l’accès de la population aux soins de santé, aux denrées alimentaires, à l’eau et au carburant. Le prix de la farine est quasiment 80% au-dessus de son prix d’avant le début de la guerre et celui de l’essence a augmenté de 130%.  

Les rares infrastructures toujours sur pied sont inabordables pour la plupart des habitants. Le secteur des soins est aussi touché de plein fouet : bon nombre des 50 000 travailleurs de la santé que compte le pays n’ont plus été payés depuis août 2016. Par conséquent, la plupart d’entre eux ont quitté le secteur public.

Tous ces facteurs ont conduit à un effondrement du système de santé. La majorité de la population n’a pas accès aux soins parce que trop peu de centres médicaux sont encore actifs ou parce qu’elle ne peut pas se payer le transport jusqu’à ceux-ci. La plupart des centres ne sont en outre ouverts que quelques heures par jour, ne peuvent compter que sur des effectifs limités et souffrent d’un manque chronique de matériel et de médicaments. 

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Épidémie après épidémie

Des maladies et blessures facilement soignables deviennent mortelles parce qu’elles ne sont pas traitées – ou le sont trop tard – et des enfants meurent de maladies qui auraient pu être évitées notamment grâce à la vaccination. Les épidémies de choléra et diphtérie qui ont éclaté en 2017 sont symptomatiques d’un pays en conflit.

L’accès limité aux soins de santé, à l’eau potable et à des installations sanitaires adéquates a contribué à l’apparition du choléra. La création de quelques dizaines de centres de traitement et points d’eau a permis de mettre un terme à l’épidémie en octobre de cette année-là.

une maman et son enfant au Yémen
Une famille admise dans un centre de traitement du choléra à Abs. ©  Mohammed  Almhadi / MSF. Yémen, août 2018.

L’épidémie de diphtérie, qui a éclaté peu après, est elle aussi caractéristique de la situation générale du système de santé. Dans de nombreux pays, cette maladie est éliminée grâce à des campagnes de vaccination systématiques des enfants. Au Yémen, le dernier cas connu avait été enregistré en 1992. Et pourtant, en 2017, nous avons pris en charge  environ 400 nouveaux patients – preuve que l’effondrement du système de santé expose de nouveau la population à des maladies évitables et potentiellement mortelles.

Le retour du choléra

Début 2019, des cas de choléra ont été recensés par nos équipes au Yémen. Le choléra est considéré comme endémique dans le pays, mais l’augmentation de ce nombre de cas est préoccupante, car la saison des pluies - qui pourrait aggraver la situation générale - n’a pas encore commencé.

MSF intensifie sa réponse face à l'augmentation de cas de choléra

Crise alimentaire au Yémen?

Nous ne disposons pas de suffisamment de données fiables ou récentes pour pouvoir annoncer une crise de malnutrition imminente au Yémen. Mais une grande partie de la population est sous-alimentée et nous pouvons clairement indiquer quelques lieux où le nombre de cas de malnutrition aigüe sévère est en augmentation.

Nos équipes constatent que les très jeunes enfants sont les principales victimes de malnutrition aigüe sévère, souvent parce que les mères doivent arrêter d’allaiter trop tôt – voire ne peuvent parfois même pas commencer – ou à la suite d’une maladie. Nous soignons ces enfants avec des aliments thérapeutiques. 

Que font les équipes MSF sur place?

Pour répondre à ces besoins humanitaires croissants, MSF a élargi de manière systématique son aide médicale d’urgence dans le pays ces quatre dernières années.

carte des activités MSF au Yémen
Carte des activités MSF au Yémen. 

Nos équipes travaillent désormais dans 12 hôpitaux et centres de santé à travers 11 provinces et nous soutenons 20 établissements de santé publics. Les hôpitaux que nous gérons sont souvent les seules infrastructures médicales disponibles dans un rayon pouvant parfois aller jusqu’à une centaine de kilomètres. 

Avec près de 1800 collaborateurs nationaux et internationaux et, d’après les estimations, avec 20 millions de personnes ayant besoin d’aide humanitaire, nos activités au Yémen comptent parmi nos projets les plus important. En outre, nous avons envoyé plus de 4700 tonnes de matériel, dont des kits chirurgicaux, des appareils médicaux et des médicaments à des hôpitaux publics et centres de santé dans le pays. 

membre MSF et patient à Aden
Au sein de l'hôpital d'Aden ©  Agnès Varraine-Leca/MSF. Yémen, décembre 2018.

Stop aux attaques contre les structures médicales!

Le non-respect des principes humanitaires et de la sécurité des infrastructures médicales, ainsi que les restrictions à l’importation dues au blocus de la coalition saoudienne empêchent les organisations humanitaires présentes d’intervenir correctement. Il faut protéger les infrastructures civiles – hôpitaux, écoles, routes, transport de marchandises – durant les combats, mais surtout, et de toute urgence, la population. Pour son bien-être, il est capital que toutes les organisations puissent préserver leur indépendance.