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Objectifs de développement durable : 15 ans pour faire face aux défis mondiaux, y compris la santé, d'ici 2030

Dossier

Objectifs de développement durable : 15 ans pour faire face aux défis mondiaux, y compris la santé, d'ici 2030

Mis à jour le ven, 09/25/2015 - 15:51


Les Objectifs de développement durable (ODD) ayant pour thème «Ne laisser personne derrière» remplaceront les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), qui ont guidé les politiques de développement, y compris la santé, depuis 2000.

Les dirigeants mondiaux représentant les 193 États membres des Nations Unies adopteront les ODD à la fin septembre à New York lors d'un sommet spécial. Les 17 objectifs et les 169 cibles (ou sous-objectifs) seront applicables à tous les pays, riches et pauvres, et aborderont un large éventail d’enjeux mondiaux, parmi lesquels la santé, les changements climatiques, le développement économique, les droits humains et l'égalité des sexes.

© MSF
© MSF


Cibles des ODD relatives à la santé

Les aspirations à la santé mondiale sont énoncées dans l’Objectif 3 « Garantir la bonne santé, promouvoir le bien-être de tous à tous les âges » ; d'autres ODD comportent également des cibles qui auront un impact sur la santé. Ils visent, d'ici 2030, à :

  • éliminer les décès évitables chez les nouveau-nés, les enfants et les femmes enceintes;
  • éradiquer les épidémies comme le sida, la tuberculose et le paludisme;
  • garantir un accès aux soins de santé, aux vaccins et aux médicaments;
  • mettre fin à la malnutrition;
  • améliorer les services d’assainissement et d'hygiène;
  • améliorer les interventions d'urgence;
  • garantir une assurance maladie universelle.

Les ODD sont des objectifs pertinents, mais il n'y a pas encore de plan clair pour les atteindre.  Médecins Sans Frontières (MSF) veut savoir comment les cibles en matière de santé deviendront plus qu’un vœu pieux.  Pourquoi? Parce que MSF travaille dans plus de 60 pays et est témoin de tendances troublantes en développement et dans les niveaux de financement qui sont déphasés par rapport aux besoins de santé des populations et aux ambitions en matière de santé exprimés dans les ODD. Ce désalignement continue de détruire des vies et de paralyser des communautés.

Moses Sanangura, 8 mois, est inclus dans le programme de MSF de lutte contre la transmission du VIH de la mère à l’enfant au Zimbabwe. © Brendan Bannon

En réalité, des écarts entre les besoins et les ambitions des ODD en matière de santé

  • Dans de nombreux pays où MSF travaille, un nombre choquant de femmes meurent encore inutilement. À l'heure actuelle, 38 fois plus de femmes meurent en accouchant en Afghanistan qu’au Royaume-Uni. Les taux de mortalité maternelle sont 178 fois plus élevés en République centrafricaine qu'au Japon, et 220 fois plus élevés au Tchad qu'en Suède. (Lire le rapport sur la mortalité infantile)

  • Une fois que les pays sont classés comme pays à revenu intermédiaire, ils perdent leur soutien international et pourtant c’est là que vivent plus de 70 % des plus pauvres et le plus grand nombre de personnes vivant avec le VIH / sida, la tuberculose, le paludisme et les maladies non transmissibles dans le monde. Malgré l'amélioration de leur situation économique, la plupart d’entre eux ne peuvent assumer le coût financier de ces maladies, et leurs systèmes de santé ne sont pas en mesure d'offrir des soins vitaux aux plus pauvres et aux plus marginalisés. (Lire l'opinion de Meinie Nicolai, Présidente de Médecins Sans Frontières Belgique)
  • Nombreux sont les pays où les populations ne cherchent pas de soins médicaux en raison d'obstacles financiers ou ne peuvent pas accéder aux médicaments dont ils ont besoin parce qu'ils ne sont pas disponibles. Par exemple, seulement une personne sur cinq dans le monde souffrant de tuberculose multi-résistante (TB-MR) reçoit un traitement.
  • Concernant les épidémies, la surveillance épidémiologique, ainsi que la préparation, le système d’alerte et les interventions sont souvent mal adaptés aux besoins locaux et à la réalité.
  • Les migrants et les réfugiés souffrent des conséquences médicales des politiques restrictives actuelles.

Les gains en santé des 15 dernières années en péril

Au cours des 15 dernières années, des ressources exceptionnelles ont été mobilisées pour sauver des vies et atténuer les souffrances. De nouvelles sources de financement, y compris le Fonds mondial, Gavi et PEPFAR, ont fourni un soutien financier sans précédent pour la santé mondiale. Les organismes de santé qui agissent à l’échelle mondiale, les gouvernements et les groupes de la société civile ont mis en œuvre des stratégies innovantes qui ont ciblé les grandes maladies, aidé à payer pour les médicaments et le personnel médical, abordé la problématique de la stigmatisation, déployé des services communautaires efficaces et contesté les politiques et les lois restrictives.

Il en a résulté des progrès visibles et mesurables dans l'amélioration de la santé des populations.

Toutefois, ces gains sont fragiles. Ils doivent être consolidés et accélérés en continuant d’adopter des approches éprouvées et en proposant des alternatives flexibles, sinon les progrès risquent d'être perdus.

À titre d’exemple, prenons les chiffres mondiaux sur le traitement du VIH. Bien qu'encourageants, il y a encore de nombreux pays où les patients n’ont pas accès à un traitement. En République Démocratique du Congo, par exemple, seulement 17 % des personnes ayant besoin d'un traitement le reçoivent. Le déploiement du traitement antirétroviral doit être accéléré, et les services de santé doivent être réorganisés pour permettre aux malades d’accéder plus facilement au traitement et de le respecter. Sans ces étapes, les progrès mondiaux dans la lutte contre le VIH stagneront.

Soutien inadéquat en recherche et développement (R & D) et manque d'accès aux vaccins et aux médicaments

  • Un soutien en R & D pour les pays en développement est absolument nécessaire. Ebola est un excellent exemple de l'échec du modèle global en matière de R & D. Les équipes médicales de MSF ne disposaient pas de traitements, de tests diagnostiques rapides, ni de vaccins pour les près de 10 000 personnes admises à ses Centres de traitement Ebola, y compris les 5 200 personnes avec diagnostic confirmé d’Ebola.
  • Le coût de la trousse de vaccination de base est maintenant 68 fois plus élevé qu'il ne l’était en 2001. Cela signifie que dans de nombreux pays, les vaccins restent trop chers pour être accessibles aux gouvernements ou organisations humanitaires comme MSF.

 

  • De nouveaux médicaments antituberculeux ont été mis au point, mais dans de nombreux pays ils restent inabordables ou indisponibles. Il faut en faire plus pour faire face à cette grave urgence de santé publique.
  • Pour atteindre toute cible qui concerne le traitement de l'hépatite C, les gouvernements devront déployer des efforts considérables pour réduire les prix des nouveaux médicaments. À l'heure actuelle, aux États-Unis et dans les pays de l'UE, les médicaments pour traiter le virus de l'hépatite C coûtent souvent jusqu'à 1 000 US $ le comprimé, ou 84 000 US $ pour l’ensemble du traitement.

© Traitement de l’hépatite C en Inde. Siddharth Singh/MSF

 

  • Les pays à faible revenu doivent faire un meilleur usage des flexibilités commerciales créées pour améliorer l'accès aux médicaments des pays en développement (les flexibilités de l'ADPIC), mais leur capacité à le faire est menacée par les nouvelles réglementations et les accords commerciaux internationaux de plus en plus restrictifs. L'Inde, la pharmacie du monde en développement, est sous pression de la part des Etats-Unis et d'autres pays à revenu élevé pour arrêter de produire des vaccins et des médicaments génériques. Dans cette éventualité, les répercussions seraient graves pour beaucoup de pays et de projets de MSF à travers le monde, car il en résulterait une augmentation considérable du coût des médicaments et des vaccins

Le financement de la santé en baisse

  • Vers la fin de l'ère des OMD, le financement international de la santé a été réduit. La santé a été reléguée à une fonction économique plutôt qu’à une priorité urgente. Par exemple, certains pays recommencent à facturer des frais d'utilisation pour les services de santé. Cela aura probablement comme conséquence que des populations pauvres seront incapables d'obtenir des soins de santé et que les pays fourniront des services de santé de mauvaise qualité aux pauvres plutôt que de viser l’assurance maladie universelle ou « Ne laisser personne derrière ». MSF a été témoin de la façon dont les coûts de la santé posent problème pour les personnes vivant dans la pauvreté extrême dans un pays où l’on vit avec moins de un dollar par jour. Quand une simple consultation coûte l'équivalent de 25 jours de revenus, les soins de santé ne seront tout simplement pas à la portée des plus pauvres. (Lire le rapport "Sans argent, pas de soins!")
  • Si le monde veut réellement atteindre les cibles des ODD et maîtriser les grandes maladies, il devra y avoir des attentes réalistes quant à la façon dont les gouvernements peuvent financer adéquatement les soins de santé. Les pays ayant d'importantes lacunes devraient recevoir un soutien, y compris ceux qui sont classés comme pays à revenu intermédiaire. Le financement international pour la santé ne devrait pas être réduit.
  • À l'heure actuelle, MSF craint sérieusement que certains des principaux pays donateurs ne soient pas sur la bonne voie en raison des efforts pour réduire les investissements essentiels de lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme. Le rôle du Fonds mondial et des autres acteurs qui sont essentiels pour assurer les plus bas prix pratiquables des nouveaux médicaments contre ces maladies pourrait être compromis par les stratégies de développement du marché.

Manque de volonté politique et de leadership sur la santé

  • Le positionnement des besoins en santé au cœur des interventions de développement est encore largement absent dans la plupart des pays, alors qu'il n'a jamais commencé dans d'autres.
  • Les gouvernements sont rarement tenus responsables pour leurs promesses de financement du secteur de la santé et des soins de santé. Des populations entières sont toujours privées d’accès à des soins adéquats et nécessaires. Le développement doit avoir amélioré et maintenu l'état de santé, comme un pré-requis, et pas seulement comme un résultat de la croissance et du développement économique d'un pays.
  • Des plans d'action concrets et immédiats basés sur les besoins, les priorités, la science et les meilleures pratiques peuvent avoir un effet sur les écarts en matière de soins de santé ainsi que sur les menaces émergentes.
  • Personne n’était prêt pour l'ampleur de la récente épidémie d'Ebola, et MSF s’est retrouvée à combler une lacune laissée par une réponse globale déficiente. Ne pas avoir sonné l’alarme à temps, l’inefficacité de la surveillance épidémiologique, la lenteur de la réponse internationale, l'absence de leadership mondial et le manque de traitements, de vaccins et de diagnostics rapides sont tous ses facteurs qui ont contribué à l'échec collectif qu'est devenue cette épidémie. Les gouvernements doivent être tenus responsables de la santé de leurs citoyens et de leurs engagements à financer les initiatives en matière de santé. La santé est une nécessité, pas une marchandise.

 

Toute vision de l’avenir doit tenir compte de la réalité d'aujourd'hui